Thursday, May 10, 2007

Horizon nécessité…



Au loin le tonnerre grondait ; les éclairs illuminaient la nuit ;

Le groupe regardait sans crainte ; ces éclairs qui étaient leurs voisins ;

Ils devraient aller chasser autre part demain, les animaux fuient le tonnerre.

Entre-temps il cueillait des fruits, des feuilles.

Leur vie était assurée ; il y avait assez d'arbres à nourriture, assez de gibier, ils ne craignaient pas les panthères, ni les serpents, ni les phacochères aux crocs acérés.

L'eau était abondante. Si la sécheresse durait, ils prenaient l'eau des arbres, des racines.

Pourtant, dans le groupe, chaque matin, lorsque le soleil se levait, parfois un jeune, parfois un ancien, regardait, là où le soleil se lève.

Au crépuscule, ils regardaient là où le soleil se couche. Ils regardaient, mais leurs regards allaient plus loin que cela.

Dans la rivière, le poisson était bon ; pourtant ils regardaient l'eau qui venait du grand fleuve rugissant, l'eau qui partait là où le soleil se levait.

Ils avaient tout ce dont ils avaient besoin, sauf une chose, la réponse !!!

Qu'y a-t-il derrière l’horizon?

Alors un jour, un groupe d'hommes et de femmes partaient. Ils allaient au-delà de l'horizon, parfois ils s'arrêtaient et un nouveau feu était allumé.

Parfois ils ne s'arrêtaient que pour une nuit et la quête continuait.

Pourquoi ?

Pourquoi quitter les arbres à nourriture, les racines, l'eau, le gibier pour aller vers des soleils inconnus, des nuits sombres, des nuages difformes

Lorsque je travaillais en Afrique équatoriale, je m'émerveillais de voir ces femmes qui partaient pour des voyages à pieds, à travers pistes boueuses, riviéres grondantes au milieu des formidables et étranges cris de la forêt. Elles partaient avec un ou deux enfants, emportant un, deux, trois paniers. L'explication était qu'elles allaient vendre les produits à la ville voisine, l'explication était qu'elles allaient visiter leur mère africaine. Elles allaient voyager un jour, deux jours, trois jours, être arrêtées de si nombreuses fois par la police, par la gendarmerie, par les soldats, mais elles voyageaient.

Puis une semaine après elles revenaient, ramenant du savon, de la lessive, du sel, de l’huile de palme, du riz
Le prétexte était réel, le besoin mal exprimé, ce besoin qui pousse l'homme à aller chercher derrière l'horizon.

Plus tard, ailleurs... le vendredi soir, le samedi soir, je vois la meute des automobilistes qui se précipitent vers Casablanca, l’ogresse ou Marrakech la Rouge, Pourquoi ?

Je me suis complètement fourvoyé la dernière fois, je pensais à nos besoins fondamentaux, à ce qui nous fait vivre.

Nous vivons sous la loi d'un ordre et un seul : Vis !!!

Pour ce faire nous avons deux décrets d'applications :

La sexualité

Le pouvoir

Mais ce n'est pas vrai, il reste quelque chose d'inexpliqué :

Nous voulons, nous avons absolument besoin de bouger, d'aller derrière l'horizon

Bouger est un besoin fondamental : la prison, c'est comme si on coupait la langue des délinquants ou leurs jambes.

Alors, lorsqu'on arrive dans un hôpital, c'est une horreur lorsqu'on vous dit :

« Voici votre lit ».

L'hôpital veut vous traiter comme une pièce sur une chaîne de montage en flux pas très tendu. La pièce à traiter doit être posée à un endroit précis pour qu'on puisse la retrouver rapidement ; le lit est aussi une manière de déshumaniser le malade ; dans toute sa vie, ce malade n'aura jamais reçu ses amis, ses connaissances dans un lit, cela aurait été la honte, et voilà qu'il doit vivre dans un lit.

Bouger ; Je ne crois pas que je pourrais oublier ; j’ai visité des établissements hospitaliers comme on dit... Je me vois marchant dans un hôpital, passant d'un Service à l'Autre, puis arrivant devant une porte, une porte avec une petite fenêtre grillagée, et derrière, ces visages de femmes, parfois âgées, collées contre la fenêtre, les mains à plat contre la vitre.

Ces dames venaient jusqu'à la porte, secouaient la poignée, regardaient étonnées, repartaient pour la promenade dans les couloirs de l'Hôpital, revenaient à la porte, secouaient la poignée, ne comprenaient pas…

Lorsqu'on vous refuse le droit de bouger, on vous appelle un « prisonnier ».

Un prisonnier, c'est quelqu'un qui attend, soit que la porte de la prison s'ouvre, soit que la porte de la cellule s'ouvre…pour aller vers l’horizon…se retrouver ailleurs que là où il est…une nécessité…

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